Chronique pour le plus cool des groupes américains: Pavement!
S'il fallait attribuer un prix de coolitude à un groupe de rock, ne cherchez pas les candidats. Pavement reste à jamais le number one. Avec sa dégaine d'éternel étudiant nonchalant, Stephen Malkmus et sa bande d'indie rockers venus de Californie a marqué le rock US comme peu de groupes dans les années 90. Catalogué roi du rock lo-fi avec leur cultissime premier album, le noisy et essentiel Slanted and Enchanted, le groupe signait en 1995 avec ce Wowee Zowee foutraque, un sublime concentré d'indie pop déviante.
Délaissant le son noisy et abrasif des débuts et s'émancipant de l'inspiration évidente d'un Sonic Youth, Pavement signe son album le moins cohérent, le plus bancal, le plus bordélique mais finalement peut-être le plus attachant. Réputé slackers (branleurs) tant leur nonchalance est légendaire, le groupe signe pourtant parmi ces 18 titres hétéroclites quelques perles de pop mélodique fondamentale portées par la voix cool de Stephen Malkmus.
Parfois mélancolique, parfois furieux, parfois sérieusement perché, parfois sublime, le rock de Pavement ressemble à une soirée étudiante un peu trop embrumée de vapeurs suspectes. Chaque titre, court et piquant comme un shot de tequila, nous fait oublier le précédent dans un joyeux chaos. Pourtant le premier titre, le mélancolique et sublime "We Dance", délicate ballade acoustique et son piano élégant invitent plus à l'introspection qu'à la fête débridée. Le groupe va ainsi multiplier les fausses pistes et dérouter l'auditeur. Rock furibard et perché avec les punky "Serpentine Pad" et "Flux=Rad" , ou les dingos "Brinx Job", "Best friend's Arm", "Extradition" et "Western homes" (gros délire sous substance illicite). Pop-rock mélodique d'orfèvre avec le mélancolique "Black out", le sublime "Grounded" (l'intro de guitare lumineuse!), l'éthéré et country (!) "Father to a sister of thought", ou le noisy et étrange "Motion suggests". J'adore l'aspect complètement barré de l'ensemble qui n'est pas sans rappeler le Beck bricolo de Odelay. Le groupe au sommet de son art ne semble renoncer à rien. Au milieu de ce joyeux foutoir, le groupe va poser plusieurs titres emblématiques qui sont entrés dans la légende de l'indie-rock américain. Le parfait "Rattle by the rush", cool, catchy, mélodique (le solo!) qui donne furieusement envie de rouler le long de l'océan fenêtres ouvertes. Même ambiance, groovy et cosy, sur "Grave architecture", rock barré qui a pris trop de soleil. Pavement pur sucre avec les imparables "Kennel district", "Pueblo", "Fight this generation", titre bipolaire à tiroirs ou le génial "AT & T" au refrain addictif. I feel fine! Sur le titre le plus long, les 6 minutes de "Half a canyon" le groupe propose un blues déjanté, parfait résumé de leur talent sur cet album. Furieux et bordélique, noisy et mélodique.
Si vous avez un doute sur l'influence de ce groupe, un des plus gros succès de Blur, le classique et catchy Song 2, est sans doute le plus gros braquage musical du style Pavement tant l'inspiration est évidente. Album sous-estimé dans la discographie de Pavement, ce Wowee Zowee à la pochette étrange est une précieuse relique des années 90. Bancal, sublime, noisy, étrange, mélodique, mélancolique, mais diaboliquement COOL. Stephen Malkmus saborda le groupe en 1999 (reformé pour quelques concerts en 2009), estimant avoir fait le tour de la question, ajoutant ainsi à l'aura culte du groupe. Il mène une carrière solo solide depuis, perpétuant son goût pour une pop barrée et nonchalante.
Cool, je vous dis! COOL!
Tracklisting:
- "We Dance" – 3:01
- "Rattled by the Rush" – 4:16
- "Black Out" – 2:10
- "Brinx Job" – 1:31
- "Grounded" – 4:14
- "Serpentine Pad" – 1:16
- "Motion Suggests" – 3:15
- "Father to a Sister of Thought" – 3:30
- "Extradition" – 2:12
- "Best Friend's Arm" – 2:19
- "Grave Architecture" – 4:16
- "AT & T" – 3:32
- "Flux = Rad" – 1:45
- "Fight This Generation" – 4:22
- "Kennel District" – 2:59
- "Pueblo" – 3:25
- "Half a Canyon" – 6:10
- "Western Homes" – 1:49